La Grande Peur Dans La Montagne RAMUZ Charles-Ferdinand
La Grande Peur dans La MontagneLes pâturages du plateau qui surplombe Sasseneire sont-ils maudits? Dans ce petit village des Alpes du Valais suisse, de la bonne herbe est ainsi laissée à l'abandon. Que s'est-il passé il y a vingt ans? Les anciens en parlent avec effroi comme d'un grand malheur. Nul, après tout ce temps, ne sait plus ce qu'a vraiment été cette histoire de maladie de bêtes dont les détails sont perdus. La jeunesse balaie les anciennes peurs et décide que ces pâturages doivent à nouveau être utiles aux bêtes du village. Une nouvelle expédition à l'alpage est décidée avec un petit groupe d'hommes: Le Maître, son neveu Barthélémy, seul «rescapé de la précédente expédition» et qui se croit à l'abri avec son petit papier magique, Romain , Julien, un jeune amoureux, et enfin Clou. La désapprobation des anciens n'y changera rien et leurs avertissements resteront lettre morte. La vie s'organise au chalet d'alpage planté au milieu d'un décor que C. F. Ramuz nous décrit avec talent. Avec lui, la montagne devient un personnage à part entière, elle s'anime avec sa grandeur et sa puissance qui domine les hommes. La montagne a ses secrets et ses mystères qui nous fait nous sentir bien petits et à la merci des éléments. Peu à peu la peur tisse sa toile dans le groupe. Y a-t-il vraiment une malédiction attachée à cette terre? Les anciens avaient-ils raison? La nature ne laissera aucun répit aux hommes présents là-haut, ni la maladie. Une lente descente aux enfers personnelle et collective. La nature est-elle plus forte que les hommes qui ne peuvent que l'écouter et rester humble?La Guerre dans le Haut-PaysEn 1797, les idées révolutionnaires arrivent de France dans les Préalpes vaudoises, jusqu'à la vallée des Ormonts, dans le canton de Vaud. Le Bas de la vallée est déjà acquis aux nouvelles idées, mais le Haut, très conservateur, reste attaché au canton de Berne. Dans ce contexte historique tendu, les villages du Haut se rassemblent pour résister à l'ennemi du Bas ; seuls deux individus sont tentés par la Révolution : le vieux soldat un peu anarchiste Ansermoz et David, le fils du plus virulent conservateur antirévolutionnaire, qui va le renier pour ses idées libertaires. David quitte donc son père et son village pour aller s'engager avec les soldats du Bas. Le malheur est que David est très amoureux de Félicie et ne vivra que pour la revoir et lui dire qu'il l'aime. Pendant ce temps, restée au village, Félicie se morfond en silence et tombe dans une folie désespérée, malgré les tendres attentions de son père. Jusqu'au jour où, mue par son instinct amoureux, elle se lève et part seule à la recherche de David dans la montagne. La fin n'est pas en forme de happy end, on s'en doute, elle sera douloureuse et brutale pour les deux amoureux. Ramuz nous livre une magnifique et tragique description du combat entre l'amour et la politique, du conflit de génération entre père et fils, des tensions entre le Haut et le Bas qui divisent les habitants de cette vallée.